Tu étais allongée au sol, les carreaux tâchés de quelques gouttes de sang, tu saignais du nez, ton père venait encore de t'attraper, tu n'avais pas fait ce qu'il t'avait demandé, tu lui avais tenu tête, chose à ne pas faire, en guise de réponse il t'avait cogné. Ta sœur n'était pas là, tu ne sais pas où se trouvait ta mère, de toute façon cela ne changeait rien, tu étais seule face à cet être immonde, tu avais beau lui hurler d'arrêter, il y prenait bien trop de plaisir, il continuait à s'en faire saigner les phalanges, ah non, s'était ton propre sang, tu tentais de te cacher le visage à l'aide de tes bras, mais il avait réussi à cogner contre ton nez. Hurlant de peur, c'est à ce même moment que ta sœur entra et se jeta sur lui afin de l'en arrêter, parfois cela pouvait dégénérer, habituellement elles étaient là l'une pour l'autre afin de défendre l'autre, mais Capucine n'était pas encore rentrée de l'école, de justesse elle venait de passer le pas de la porte et c'est en grimpant rapidement les escaliers qu'elles partirent s'enfermer dans leur chambre. Tu ne pouvais pas t'arrêter de pleurer, ta sœur tentait de te calmer, d'essuyer tout ce sang sur ton visage, tes bras te faisaient quelque peu mal, ils avaient pris tous les coups lorsque tu tentais de protéger ton visage, ça allait finir par passer, mais tu es certaines que demain tu auras des bleus contre ta peau, facile à cacher avec des manches longues. Par chance, ton nez n'avait rien de grave, il n'était pas cassé "Je n'en peux plus!" Tu venais de hurler cela en pleurant à ta sœur, comme si tu espérais qu'elle trouve une solution à cela, elle est la plus vieille, elle a toujours su prendre soin de toi, te protéger. Rapidement elle passa ses mains dans tes cheveux blonds, te regardant droit dans les yeux, elle tenta de te rassurer en te faisant la promesse que tout ceci allait finir par cesser un jour.

Tu te trouves face à lui, il te dévisage, difficile de ne pas remarquer ce qui clochait chez elle, doucement tu baissas ta tête comme si tu espérais que tes longs cheveux blonds allaient recouvrir ton visage, mais il pose ses doigts sous ton menton, te forçant alors à lui faire face. Tu sais qu'il n'aime pas te voir comme ça, qu'il serait près à tout pour éclater la tronche de celui-ci qui avait osé lever la main sur toi, tu avais prit pour habitude de dire que tu es tellement maladroite que tu avais fini par glisser dans ta salle de bain à t'en fracasser le crâne au sol, violente chute, ou bien que tu t'étais inscrite dans un de ces cours d'auto-défense, mais tu te sens tellement si impuissante face à une araignée, à hésiter à écraser ta chaussure sur la tête, que cette excuse n'est même pas valable, pas valable aux yeux de ton meilleur ami, non le responsable de cette marque violette qui s'était dessinée sur le contour de ton œil, était la faute de ton père, ce minable qui frappait plus faible que soit et ta mère est tellement conne qu'elle le laisse faire, sans rien dire, à t'en regarder en saigner. Il pouvait relever sa manche, il verrait la trace de la main de ton père qui t'avait empoigné violemment ce soir-là "Je vais le tuer" dit-il en contractant sa mâchoire. Tu secoues doucement ta petite tête blonde "Ne dis pas ça" Instinctivement tu lui attrapes la main, comme si tu espérais que ce simple contact allait l'apaiser. Il porte son regard sur toi, te fixe avec dégoût, non ce n'est pas toi qui le dégoûte, mais le fait que ton père ose lever la main sur toi "Il faut que ça cesse" murmura-t-il en laissant glisser doucement ses doigts sur ton bleu, par la douleur tu grimaces, aussitôt il retire ses doigts et te prend dans ses bras, il n'ose même pas te serrer fort contre lui, comme s'il avait peur de te casser, tu étais fragile, tu le savais, une gamine comme toi ne peut rien faire face à cet être qui est supposé être ton père "Je m'en vais, ma sœur va m'emmener avec elle" Tu venais de chuchoter ces quelques paroles, la tête posée contre son torse, tout d'un coup, son étreinte se fit plus forte contre ton corps "Partir..." Il n'avait pas fini sa phrase, tu savais que son inquiétude était que tu quittes la ville en le laissant derrière toi, tu t’apprêtais à le décevoir "Nouvelle ville" Tu venais de lui apprendre une mauvaise nouvelle, un soupire d'agacement s'extirpa de ses lèvres, ce qui te fit encore plus de peine, penser à le quitter ne te serais jamais venue à l'idée et pourtant ce jour venait d'arriver, il compte vraiment pour toi, le seul peut-être en plus de ta sœur qui étais celle qui allait te sortir de cet enfer dans lequel tu vivais depuis maintenant seize ans. Dorénavant, tu pourras vivre ta propre vie, faire ce que bon te semble sans avoir la crainte de te retrouver le crâne explosé contre le sol de la cuisine, tu n'auras plus cette crainte et pourtant c'est une chose qui t'a marquée à vie et qui ne s'évapore pas si facilement.