Maya. Avec ses cheveux bruns qui tombent dans un halo lumineux autour de son visage de poupon aux yeux claires. Sa manière de bouger, délicate et gracieuse. Puis ses sourires. Des esquisses de vies qui brillent si fort qu'elles t'éblouissent, t'inondent d'un bonheur singulier auquel tu deviens accroc. Camé. Drogué aux joies de Maya, à ses fous rires incompréhensible et son incandescente splendeur. Elle prenait la main d'Isaac avec la facilité d'un couple accomplis, mais ils n'étaient riens de ça. Il aurait pu. Mais Maya était de ces femmes qui attendent après l'Homme et lui n'avait rien d'un Homme. Il était, c'est tout. Trop lâche pour se lancer, sans assez d'ambition pour se projeter dans le bonheur de l'ange. Il se complaisait dans son trop peu, se persuadant que c'était assez.

Puis tu sais le but du jeu, ça a jamais été d'être heureux.
C'était surtout de pas être malheureux.

« Je pars.. On va être heureux ensemble. Lui et moi. » Et il a ri. Un rire pathétique, mesquin. Un rire qui fait mal, qui brûle ses poumons, fout le feu à son coeur devenu trop mou. Puis une douleur physique, celle de la claque qu'elle venait de lui coller avec son air effaré de poupée à la dignité bafouée. Elle attendait la main tendue qu'il lui offrait toujours, celle qui dit « je t'attends » et qui tait la souffrance. La force de mentir, il ne l'avait pas. La rancune, Maya l'avait. « Va te faire foutre Isaac. »

Puis ça s'éprend. Ça se prend.
Ça fait peur. Ça écœure. Ça se meurt.

Maya est revenue, avec sa bouche en cœur et ses yeux pleins de larmes. Ses cheveux décoiffés, son air de camé. Son ventre gonflé : son gosse y était planqué. Ses mains tremblaient quand elle a passé ses bras autour du cou d'Isaac, ses jambes flageolantes la portait à peine et son souffle était trop saccadé pour l'aider à se sentir mieux. Il a pas réagi face à son étreinte, il voyait que son ventre-montgolfière qui lui faisait la grimace l'air de dire qu'il avait tout foiré. Elle était un fantôme, une ombre revenant jouer les troubles fêtes dans son existence ensoleillée.

Éclipse brûlante.

« J'te l'avais dis. » Et son air mesquin suspendu à son visage, victoire implicite face au désespoir de la brune dont le maquillage a coulé. Vicieusement dérangeant, cette manière qu'il avait de la regarder, presque heureux de la voir triste. Malheureuse. Elle l'a dévisagé. Longtemps. Trop longtemps. Avec ses yeux qui l'implorent de dire autre chose. Mais elle avait perdu. Elle avait cru que c'était mieux ailleurs, plutôt que vers lui, persuadé que le mutisme du lâche signifiait l'indifférence. Et a cet instant, il n'avait plus aucune hésitation quant au comportement qu'il voulait avoir.

Silence.
Maya est partie. Elle ne reviendra jamais.
Et lui, il est trop con.

Déboires sentimentaux à deux balles qui refilent des ulcères et font devenir grises les journées les plus belles. Esquisse de sourire incertain, Isaac fronce les sourcils et contemple. Persuadé d'être différent, délire mégalomane d'imbécile, certain de ne jamais se faire prendre aux jeux de dupes des relations. Attrape-sentiment, dévorant les cœurs des plus offrantes, les espoirs des plus naïves et la dignité des plus idiotes. Il est devenu la mauvaise case par laquelle il ne fallait pas passer, celle qui se met vicieusement sur votre route avec l'amabilité des plus doux et l'indifférence des plus vicieux. Ike esquisse des sourire, marmonnes des mensonges, façonne des vérités.

Poudre aux yeux.
Et les plus naïves finissent pas lâcher prise. Les innocentes s'embourbent dans leur amour à deux francs et Ike se lasse. Délaisse. Il prend ce qu'on lui donne et s'en va. Repoussant les limites de l'indécence, de l'indifférence.

Casarei, qui résonne comme une mélodie, un écho sur lequel tout le monde se retourne. Suintant d'une sympathie presque irritante. Trop parfait, trop irréel, avec leurs principes à la con, cachant derrière leurs sourires synthétiques des brèches de souffrances que personne ne voyait. Que personne ne voulait voir.
Et Laína. Avec sa chevelure qui lui donne des airs féroces lorsqu'elle n'est qu'une brebis perdue. Un volcan à demi-éteint, à moitié vide. A mi-chemin du tout, du rien. Dans les rangs mais rêvant d'en sortir. Paumée dans sa prison dorée faites de prière et de signe de croix. C'était évident, presque trop. Elle avait dans le regard la lueur étrange de celle qui veut plus que ce qu'elle n'a, de celle qui a beaucoup mais jamais assez, tant de chose mais pas ce qu'elle désire réellement.

Paradoxe de l'oiseau en cage dorée.

Isaac l'avait su, dès le départ, jouer avec la petite catho propre sur elle qu'était Laína s'était jouer les funambule sur une lame de rasoir, un pas de travers et ça ferait mal mais l'apothéose était sa victoire. Il souriait avec une sincérité falsifiée, prononçait des mots qui n'étaient pas les siens, lançait des regards amoureux d'un autre, faisait des promesses invisibles. Une marionnette à la lumière dont les ficelles étaient tirées par l'ombre de celui qu'il était réellement. Elle répond aux sourires, rougit aux belles paroles, est presque gêné devant les regards et, encore plus naïvement, se persuade que les promesses ne sont pas vaines.

Fondu au noir.

Bercé par les illusions, perdu dans le cosmos entre les étoiles et le néant, elle a préféré croire aux boules de gaz scintillantes, se persuader que son ciel brillerait encore de cette façon si elle lui faisait confiance. Il n'a jamais cherché à lui faire songer le contraire. Démon des sentiments, il l'a laissé s'abandonner à des mains trop habiles, à un coeur trop indifférent entre des draps déjà trop souillés. La scène avait un goût de victoire différent des autres, l'impression de puissance quand on détient ce qu'une personne avait de plus chère, abandonné simplement par des mots aussi volage que la brise d'été, qui s'envolent et ne reviennent jamais. Des promesses envoyées au loin, chassés par leur souffle entremêlé dans cette mascarade ou Laína était irrémédiablement perdante.
Jouer les amoureux transis au matin pour disparaître au soir.

Et les étoiles ont explosé.
Laína c'était qu'un truc bref. Un passage. Une étape. Un jeu.
Puis il est partit, ivre de vie, d'espoirs insatisfaits et de désir d'aventure.

Mexique. Guadelajara, Mexico, Tijuana, Cancùn, Naucalpan, Saltillo, Reynosa, Toluca, Veracruz, Celaya, Ixtapaluca, Ensenada, Uruapan, Mazatlàn, Morelia

Ecchymose de l'évolution. Bleu de parcours. Hématome des souvenirs.
Il est pas déglingué, Isaac. Loin de là. Juste ankylosé. L'intérêt des autres est aussi invisible pour lui que l'horizon pour un aveugle. Son intérêt propre n'a lui-même aucun sens réel. L'ambition se perd dans le fond des eaux sombres de la fainéantise, ne laissant subsister que l'ennui du passif qui cherche de quoi combler le vide de son existence sans avenir.

Mais, quand le tour du rien est achevé, on revient au même vide.
On redécouvre les choses, toujours aussi pathétique.
Et sa frangine, dans son coin qui a tout foiré.
Et lui qui comme toujours s'était barré.